L'Abondance en Haute-Loire : 60 ans de présence

Le syndicat Abondance en Haute-Loire à Cournon
Le syndicat Abondance en Haute-Loire à Cournon

Avec 840 vaches Abondance contrôlées, la Haute-Loire est devenue en 2018, le troisième département  comptant le plus grand nombre d’Abondance.  Une présence attestée depuis les années 50 comme le témoigne Michel Page

L’Abondance arrive en Haute-Loire au tournant des années 60

 

Si l’élevage laitier est aujourd’hui bien présent avec  40 000 vaches contrôlées (36 000 en Haute-Savoie), la Haute-Loire  n’a pas de tradition fromagère. « Ici, pendant longtemps, ce qui a fonctionné, se souvient Michel Page, ce sont les veaux gras. Les meilleurs alimentaient les villes du Sud ». D’ailleurs, le département est un des rares départements auvergnats à ne pas compter d’AOP fromagère sur son territoire. Pas d’AOP fromagère mais deux AOP viande : l’AOP Fin Gras du Meyzenc  ( au Nord-est du département) et les veaux des Monts du Velay (au Nord). « Jusque dans les années 60, les gens élevaient et trayaient des Aubracs, poursuit Michel Page, ils nourrissaient et élevaient les veaux et vendaient le surplus du lait à la coopérative ». Nous sommes au début des années 60 et l’Abondance s’installe progressivement dans le Massif-Central. En Haute-Loire, elle s’est implantée, dès les années 50   dans le Nord du département (le Mézenc et le Vélay) depuis l’Ardèche voisine. Dans le Sud du département (Margeride et secteur de Saugues), l’Abondance apparait au début de la décennie suivante. Après la mise en place de la prophylaxie, certains élevages se  spécialisent alors en lait. « Commencez par les Abondances et les Tarines, plus rustique, pour vous faire la main avant de passer à la pie-noire, nous a conseillé notre technicien de l’époque, sourit Michel Page.  Mais, ici, les Abondances ne sont jamais parties. » Dans le département, les élevages Gagne et Tholance font alors référence, mais ce ne sont  pas avec des vaches nées en Haute-Loire que Michel Page a fondé son troupeau, ni avec les veaux achetés dans la vallée d’Abondance mais dans les Hautes-Alpes avec Bijou née en 1961 et dont descend aujourd’hui presque l’intégralité du troupeau 

Hermine, (Quinquet) née en 1969, petite-fille de Bijou
Hermine, (Quinquet) née en 1969, petite-fille de Bijou
Zibeline, fille de Bizarre et d'Hermine est née en 1974.
Zibeline, fille de Bizarre et d'Hermine est née en 1974.

Bouclette, née en 1986, meilleure mamelle à Paris est la mère du taureau Jetset
Bouclette, née en 1986, meilleure mamelle à Paris est la mère du taureau Jetset

Une race adaptée au pays

 

A 1 000 mètres d’altitude à Venteuges, les hivers sont longs, les étés souvent secs. « Pour nous, l’Abondance était la mieux adaptée au pays explique Michel Page. Elle marche, se déplace, pâture. Sa capacité à vieillir, à bien vêler et son taux protéique faisaient la différence ».  Et il y a le goût de la sélection. Le troupeau est inséminé à 100 % depuis 1964, les générations s’accumulent et avec elles les vaches marquantes. Hermine (Quinquet), née en 1969,  petite-fille de Bijou ; Zibeline sa fille par Bizarre née en 1974 qui se démarque sur les concours départementaux ;  Toupie (Joli-Cœur), née en 1982,  la première mère à taureaux … En 1985 naît Anguille, la vache la plus connue de l’élevage. Cette fille de Tintouin de la série de testage est  une arrière petite-fille de Zibeline. Elle représentera l’élevage à Paris pour la première fois en 1990, y retournera à deux autres reprises, et remportera en 1994, le championnat adulte. Mère à taureaux, elle aura plusieurs fils diffusés en  testage (Fougueux, Facteur, Galopin (Joli-cœur) et Hadoc (Utriple) sera agréé. Pendant toutes ces années toutes les vaches étaient inséminées en race pure, le nombre de femelles étant important, beaucoup sont vendues (veaux, génisses prêtes, vaches en lactation) à des élevages du Massif-Central cherchant à développer l’Abondance.

« Finalement, reconnait Michel Page, on avait une certaine assurance. Le prix du lait était assez bas mais il a augmenté de manière continue entre 1963 et 1998. Et le prix des veaux faisaient la différence ». 

 

 

Baisse et volatilité des prix depuis 20 ans 

 

20 ans plus tard, le constat n’est plus le même. Pour Emmanuel Page, le fils de Michel, installée depuis 2013, la  visibilité économique même à moyen terme n’existe plus. Les crises laitières de 2009 et 2016 ont laissé des traces et le prix du lait stagne. Il fluctue d’un mois sur l’autre  au gré du marché allemand et français (329 €/1000 litres en août 2020 ; 323 € en juillet). Acheté par la coopérative Sodial, le lait est transformé en fromages à raclette. Depuis 2013, Emmanuel Page transforme une partie de sa production en yaourts nature. Ecoulés auprès des hôtels et magasins de la région, ils permettent une valorisation intéressante du litre de lait.

Difficulté supplémentaire, depuis 5 ans, les veaux se vendent difficilement, rappelant pour beaucoup la crise des années 80. « Dans les années 80-85, la commercialisation des veaux gras est devenue compliquée. Cela était lié à la crise des veaux aux hormones se souvient Michel Page. Petit à petit, ils ont été remplacés par la vente de veaux plus jeunes, âgés de 3 à 5 semaines. La demande était forte : les meilleurs partaient pour l’Italie, les autres pour l’Espagne ».  Durant 25 ans, de 1990 à 2015, les prix de ces petits veaux ont atteint leur maximum. Depuis les marchés se ferment progressivement entraînant une baisse des cours et poussant de nombreuses exploitations à cesser leur activité laitière. « Sur le secteur du Gévaudan, c’est la moitié des fermes qui a  arrêté depuis mon arrivée en 2006 », reconnait Maxime Prat, inséminateur du secteur.

S’adapter aux contraintes actuelles

 

Sur le territoire, les projets visant à la réappropriation de la production agricole par les agriculteurs existent. En commençant par les veaux, tradition oblige. A Saugues, un marché au cadran, soutenu par la municipalité,  a été créé l’an dernier et a remplacé le marché traditionnel où chaque marchand allait négocier avec le vendeur. 70 à 75 veaux s’échangent chaque semaine avec une plus value intéressante. En moyenne l’an dernier, Emmanuel Page a vendu ses veaux  à l’âge de 4 à 5 semaines en race-pure 207 € (de 135 € pour une jumelle femelle à 280 €). Les croisés charolais affichent quant-à-eux, une moyenne de 376 € (de 290 à 485 €). Pour profiter de cette plus-value, les inséminations avec des taureaux charolais ont été développées et atteignent maintenant la moitié du cheptel.  « Depuis trois ans, nous génotypons toutes nos génisses, explique Emmanuel Page. Les moins intéressantes sont inséminées en charolais. Pour certaines, nous essayons d’avoir au moins une femelle pour  continuer la lignée ». Car la sélection n’a pas été oubliée. L’élevage affiche un ISU à 111 et continue d’alimenter le schéma de sélection Auriva en veaux mâles. Jetset (Instant), fils de Bouclette a été largement diffusé en 2016 en tant que jeune taureau. Ses filles entrent cet automne en production dans de nombreux élevages. Nostress, le fils de Jetset a été le taureau le plus utilisé l’an dernier en race Abondance. L’hiver dernier, Rifii (Mahnattan x Picotin) a rejoint la taurellerie de La Motte-Servolex. Il devrait être utilisé à l’automne 2021 : ses index génomiques étant très prometteurs en lait, corps et mamelle. Il descend en 14ème génération de Bijou, cette génisse achetée dans les Hautes-Alpes, le 6 juin 1964 et  ajoute un nouveau chapitre à l’élevage Page et peut-être à l’ensemble de la race Abondance.

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